Alcoolisation fœtale : Un organe inattendu entre en scène  /  Fetal alcoholization: An unexpected organ comes on the scene

Alcoolisation fœtale : Un organe inattendu entre en scène / Fetal alcoholization: An unexpected organ comes on the scene

Une équipe rouennaise a montré que le placenta constituait un formidable témoin des troubles du neurodéveloppement chez les enfants exposés à l’alcool durant la grossesse. Il recèle un nouveau biomarqueur qui permet de repérer des anomalies de l’angiogenèse cérébrale. A team from Rouen showed that the placenta was a formidable witness to neurodevelopmental disorders in children exposed to alcohol during pregnancy. It contains a new biomarker that identifies abnormalities in cerebral angiogenesis.


 


 

Si l’on sait depuis les années 1960 que la consommation d’alcool chez les femmes enceintes peut provoquer des malformations du fœtus, la recherche clinique n’a pas encore permis de déterminer avec précision dans quelles conditions ces troubles pouvaient survenir.

 

Plusieurs facteurs sont débattus : stade de la gestation, fréquence et quantité d’alcool absorbé, tendance au binge drinking. Mais les effets de l’exposition seront très variables en fonction des individus. Cette incertitude incite hélas les familles à relativiser les risques encourus, même dans les populations sensibilisées. En outre, le slogan "zéro alcool" est parfois perçu comme une injonction exagérée, culpabilisante voire infantilisante.

 

"Pourtant, il n’existe pas d’effet de seuil pour l’exposition à l’alcool. Il est toxique tout au long du développement, précise Bruno Gonzalez, directeur de recherche Inserm. Selon les périodes concernées, cette toxicité s’exprimera différemment : c’est ce que l’on appelle la fenêtre de vulnérabilité. Mais ce n’est pas parce que l’on en prend peu qu’il n’y aura pas d’effets." À la tête de l’équipe NeoVasc à Rouen, le chercheur en neurosciences étudie la formation des lésions cérébrales chez les nouveau-nés.

 

Au-delà du syndrome

 

La prévalence des troubles causés par l’alcoolisation fœtale est élevée (19,8 cas pour 1 000 en Europe selon une méta-étude menée par des chercheurs de l’université de Toronto), et sans doute sous-estimée du fait des difficultés diagnostiques. Seule la forme la plus sévère, le syndrome d’alcoolisation fœtale, est couramment diagnostiquée pendant la grossesse car elle induit des déformations du crâne et du visage observables précocement par échographie. Toutefois, de nombreux enfants victimes de l’alcoolisation maternelle ne seront repérés que vers l’âge de 5-6 ans, à l’école, lorsqu’ils montreront des troubles de l’apprentissage et du comportement (hyperactivité, retards dans l’acquisition du langage, impulsivité...).

 

Dans ces cas-là, on perd plusieurs années de prise en charge, à une période où le cerveau est très plastique et pourrait récupérer une partie des fonctions lésées. "Sans prise en charge précoce, une part importante des enfants se trouvera en situation d’échec scolaire", regrette Bruno Gonzalez. Cependant, il n’est pas concevable de suivre tous les jeunes pour lesquels il y a eu suspicion d’exposition afin d’intervenir dès les premiers symptômes. Les travaux de l’équipe rouennaise se proposent d’apporter une réponse à ce problème par le développement d’une nouvelle génération de biomarqueurs de l’alcoolisation. "Jusqu’ici, on ne disposait que de biomarqueurs d’exposition, c’est-à-dire d’outils qui permettent de déterminer si l’enfant a été exposé à l’alcool grâce à la détection de composés témoignant de son métabolisme ou de sa toxicité, dans le foie notamment, ajoute le chercheur. Il nous fallait un biomarqueur qui puisse nous informer sur la qualité du neurodéveloppement, ce qui n’existait pas."

 

En étroite interaction avec le service de pédiatrie du CHU de Rouen dirigé par Stéphane Marret, son équipe a réussi à identifier un biomarqueur dans le placenta qui indique des anomalies de l’angiogenèse cérébrales cérébrale, c’est-à-dire de la formation des vaisseaux qui vont irriguer le système nerveux. "C’est un processus concomitant avec la neurogenèse du point de vue temporel et anatomique. Les vaisseaux ont un rôle de pourvoyeur d’énergie mais également de guide dans la migration de certaines populations de cellules nerveuses", explique Bruno Gonzalez. "En bref, il faut une vascularisation cérébrale correcte pour obtenir un neurodéveloppement correct." À partir d’un certain stade du développement, les chercheurs ont observé que l’angiogenèse avait été altérée chez tous les enfants exposés à l’alcool in utero : les vaisseaux étaient bien présents, mais de manière désorganisée. De même, les cellules nerveuses qui utilisent ces vaisseaux comme guide présentaient des anomalies. Restait à comprendre les mécanismes moléculaires et cellulaires qui préludent à ces altérations.

 

L’équipe a examiné les familles de molécules qui entrent en jeu dans le contrôle de l’angiogenèse, comme le facteur de croissance de l’endothélium vasculaire (VEGF). L’alcool perturbe les récepteurs du VEGF dans le cerveau – notamment le VEGFR1. Or, il est l’unique récepteur d’un autre membre de la famille, le PLGF, ou facteur de croissance placentaire. Ce dernier est très difficilement détectable dans le cerveau, alors qu’il est présent en quantité dans le placenta : et s’il était sécrété dans le circulation sanguine du foetus, jouant un rôle dans l’angiogenèse cérébrale ? L’équipe a ainsi formulé l’hypothèse de l’existence d’une connexion placenta-cerveau qui serait effectivement perturbée par l’alcool. "Chez l’animal, nous sommes allés encore plus loin, nous avons pu démontrer la fonction de ce lien", précise le chercheur.

 

Placenta et cerveau, même combat

 

L’examen de placentas alcoolisés et non alcoolisés chez l’Homme et la souris a révélé qu’il y avait bien une relation entre les désordres vasculaires du placenta et ceux du cerveau. Le dosage du PLGF pouvait donc devenir l’indicateur d’une atteinte cérébrale de l’enfant, mais pas seulement : des études sur l’animal ont montré que réprimer ou amplifier l’expression du PLGF permettait de mimer les atteintes provoquées par l’alcool, ou de les corriger. "En plus de disposer d’un biomarqueur, nous avons un outil qui permet d’avoir une action sur les organes, ce qui est complètement nouveau, se réjouit Bruno Gonzalez. Nous avons donc déposé un brevet thérapeutique en complément d’un premier brevet biomarqueur. À présent, dans le cadre d’un troisième brevet, neurologique, nous nous demandons quel est l’impact de l’alcool et du PLGF placentaire sur la maturation et le positionnement de certaines populations de cellules nerveuses. Nous tenterons également de tester si la modulation du PLGF placentaire permet d’agir sur les troubles du comportement induits par l’alcoolisation in utero." Le placenta se révèle encore une fois un organe particulièrement intéressant car, détruit à la naissance, il permet des prélèvements faciles et non invasifs. On peut donc imaginer que cette nouvelle génération de biomarqueurs conviendrait à des stratégies de dépistage néonatal systématique. Reste qu’il faudra poursuivre les politiques de santé publique qui visent à diminuer la prévalence de la consommation d’alcool chez les femmes enceintes.

 Science 

11.02.2019




While it has been known since the 1960s that alcohol consumption by pregnant women can cause fetal malformations, clinical research has not yet been able to determine precisely under what conditions these disorders can occur.



Several factors are discussed: stage of gestation, frequency and quantity of alcohol consumed, tendency to binge drinking. But the effects of exposure will vary greatly depending on the individual. Unfortunately, this uncertainty encourages families to put the risks into perspective, even in sensitized populations. In addition, the slogan "zero alcohol" is sometimes perceived as an exaggerated, guilt-ridden or even childish injunction.



"However, there is no threshold effect for alcohol exposure. It is toxic throughout the development process," says Bruno Gonzalez, Inserm research director. Depending on the time period concerned, this toxicity will be expressed differently: this is called the vulnerability window. But just because you don't take much doesn't mean there won't be any effect." As head of the NeoVasc team in Rouen, the neuroscientist is studying the formation of brain damage in newborns.



Beyond the syndrome



The prevalence of fetal alcohol spectrum disorder is high (19.8 cases per 1,000 in Europe according to a meta-study conducted by researchers at the University of Toronto), and probably underestimated due to diagnostic difficulties. Only the most severe form, fetal alcohol syndrome, is commonly diagnosed during pregnancy because it induces deformities of the skull and face that can be observed early by ultrasound. However, many children who are victims of maternal alcohol abuse will not be detected until around the age of 5-6 in school when they show learning and behavioural disorders (hyperactivity, delays in language acquisition, impulsivity, etc.).



In these cases, we lose several years of care, at a time when the brain is very plastic and could recover some of the damaged functions. "Without early care, a significant proportion of children will be in a situation of school failure," says Bruno Gonzalez. However, it is not conceivable to follow all young people for whom there has been a suspicion of exposure in order to intervene at the first symptoms. The work of the Rouen team aims to address this problem by developing a new generation of alcohol biomarkers. "Until now, we only had exposure biomarkers, i. e. tools that make it possible to determine if the child has been exposed to alcohol by detecting compounds that reflect its metabolism or toxicity, particularly in the liver," adds the researcher. We needed a biomarker that could inform us about the quality of neurodevelopment, which did not exist."



In close interaction with the paediatrics department of the Rouen University Hospital, headed by Stéphane Marret, his team has succeeded in identifying a biomarker in the placenta that indicates abnormalities in cerebral cerebral angiogenesis, i.e. the formation of vessels that will irrigate the nervous system. "It is a concomitant process with neurogenesis from a temporal and anatomical point of view. The vessels have a role as energy providers but also as guides in the migration of certain populations of nerve cells," explains Bruno Gonzalez. "In short, correct cerebral vascularization is required to achieve correct neurodevelopment." At a certain developmental stage, the researchers observed that angiogenesis had been altered in all children exposed to alcohol in utero: the vessels were present, but in a disorganized manner. Similarly, the nerve cells that use these vessels as a guide had abnormalities. It remained to understand the molecular and cellular mechanisms that prelude these alterations.



The team examined the families of molecules involved in the control of angiogenesis, such as vascular endothelial growth factor (VEGF). Alcohol disrupts VEGF receptors in the brain - especially VEGFR1. However, it is the only receptor for another family member, PLGF, or placental growth factor. The latter is very difficult to detect in the brain, whereas it is present in large quantities in the placenta: what if it were secreted into the bloodstream of the fetus, playing a role in brain angiogenesis? The team hypothesized that there was a placental-brain connection that would actually be disrupted by alcohol. "In animals, we went even further, we were able to demonstrate the function of this link," says the researcher.



Placenta and brain, same fight


Examination of alcoholic and non-alcoholic placentas in humans and mice revealed that there was indeed a relationship between vascular disorders of the placenta and those of the brain. The determination of PLGF could therefore become an indicator of brain damage in children, but not only: animal studies have shown that suppressing or amplifying PLGF expression can mimic or correct alcohol-induced damage. "In addition to having a biomarker, we have a tool that allows us to have an action on the organs, which is completely new," says Bruno Gonzalez. We have therefore filed a therapeutic patent in addition to a first biomarker patent. Now, in the context of a third neurological patent, we are asking ourselves what is the impact of alcohol and placental PLGF on the maturation and positioning of certain nerve cell populations. We will also try to test whether placental PLGF modulation can act on behavioural disorders induced by alcohol in utero." The placenta is once again a particularly interesting organ because, destroyed at birth, it allows easy and non-invasive sampling. It is therefore conceivable that this new generation of biomarkers would be suitable for systematic neonatal screening strategies. However, public health policies aimed at reducing the prevalence of alcohol consumption among pregnant women must be pursued.

Science

11.02.2019

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Le « black-out alcoolique », une amnésie méconnue devant laquelle « nous ne sommes pas égaux » / The "alcoholic blackout", an unknown amnesia in front of which "we are not equal"

Le « black-out alcoolique », une amnésie méconnue devant laquelle « nous ne sommes pas égaux » / The "alcoholic blackout", an unknown amnesia in front of which "we are not equal"

En 2016, 20 % des adolescents disaient avoir vécu dans les six derniers mois une forme d’amnésie après avoir consommé de l’alcool. In 2016, 20% of adolescents reported having experienced some form of amnesia in the past six months after drinking alcohol.


 

 

 

En 1995, un premier chercheur, Donald W. Goodwyn, a mené une étude auprès de ses étudiants en médecine sur les black-outs occasionnels. 

 

C’est une chaleur « lourde et collante » qui l’a réveillée. Dans la tente bleu nuit, l’air était devenu irrespirable. « C’était comme me réveiller d’entre les morts », se souvient Isabelle H., alors étudiante en marketing de 23 ans. A côté d’elle, une inconnue sommeille. Alors commence pour la jeune festivalière d’un soir « le flot de questions sans réponse ». Comment est-elle arrivée là ? Qui est la personne à côté d’elle ? Où sont les amis avec qui elle a passé la soirée ? Et d’ailleurs, quand s’est terminée cette soirée ? Comment ?

 

C’était il y a deux ans : son « premier et seul black-out », une amnésie partielle ou totale due à la consommation d’alcool. Et avec lui, le sentiment « que tout s’effondre ». « Comme dans un dessin animé, quand le personnage continue de courir alors que la falaise s’est terminée, et chute dans le vide », dit la jeune femme, qui reconnaît avoir eu ce matin-là « la peur de sa vie ».

 

Elle n’avait pourtant « pas le sentiment d’avoir beaucoup bu ». Et ne comprend pas comment elle a pu « autant partir en vrille ». Bien sûr, ses amis l’ont trouvée « particulièrement enjouée et dansante ». Mais ne continuait-elle pas à leur parler, à prendre des initiatives ? Et puis, ils avaient « tous bu la même chose », alors pourquoi s’inquiéter ? « Aujourd’hui, ce qu’il s’est passé reste pour moi un mystère », reconnaît Isabelle H., qui n’a jamais connu de nouvelle amnésie due à l’alcool, et en garde encore plus « un sentiment d’irréalité ».

 

Etudes récentes

 

« Nous n’en sommes qu’aux balbutiements de la recherche sur ce sujet », reconnaît humblement Mickael Naassila, directeur de l’unité sur l’alcool et les pharmacodépendances à l’université de Picardie. D’abord, parce que le sujet d’étude est relativement récent :

 

« Très longtemps, on a cru que seuls les alcooliques étaient sujets à ce genre d’épisode amnésique. »

 

Ce n’est qu’en 1995 qu’un premier chercheur, Donald W. Goodwin, mène une étude auprès de ses étudiants en première année de médecine : 33 % de ces buveurs occasionnels affirmaient avoir connu au moins un black-out. Dans les années 2000, l’étendue du phénomène est mise en lumière par des enquêtes épidémiologiques interrogeant les jeunes sur leur consommation d’alcool. En 2016, une enquête britannique montrait ainsi que 20 % d’un échantillon de 2 140 adolescents avaient vécu dans les six derniers mois une forme d’amnésie après avoir consommé de l’alcool.

 

 

 

Des informations que le cerveau ne peut plus encoder

 

A quoi sont-elles dues ? Les études montrent que l’alcool perturbe fortement l’hippocampe, cette zone cérébrale qui joue un rôle de premier plan dans les processus de mémorisation. Le sujet vit des informations que son cerveau ne peut plus encoder pour les stocker sous forme de souvenirs à long terme. « C’est comme une cassette pour laquelle on aurait cessé un temps d’appuyer sur le bouton enregistrer », résume Aaron White, neuroscientifique au Duke University Medical Center, en Caroline du Nord.

 

Le black-out n’a donc rien à voir avec une perte de conscience, du type coma éthylique. Aucun signe extérieur ne permet en effet de l’anticiper – la personne garde un certain contrôle de sa motricité, même s’il est souvent dégradé. Pour Arthur N., architecte de 31 ans régulièrement sujet aux black-out, c’est « l’aspect le plus bizarre de ces moments ». « On est en soirée, on se sent plutôt bien, et d’un coup, on se réveille et d’autres nous racontent ce qu’on a fait. C’est comme une crise de somnambulisme », témoigne celui qui dit « beaucoup s’interroger » sur ce qui le rend « si particulièrement sensible par rapport à [ses] amis ».

 

Les femmes plus sujettes

 

Là encore, le sujet est difficile à étudier, rappelle Mickael Naassila :

 

« Il faudrait pouvoir commencer une étude au tout début de la consommation d’alcool, suivre ces phases d’amnésie quand elles surviennent et pas après coup, quand justement le sujet ne se souvient pas forcément. Ça pose des difficultés au niveau éthique, et en termes de ressources financières. » 

 

« Deux fois plus de risques » à partir de 3 grammes d’alcool dans le sang

 

Reste que la science parvient progressivement à établir certains ressorts. « C’est linéaire, plus vous buvez, plus vous avez des atteintes sur l’hippocampe », résume le chercheur américain Aaron White. A partir de 3 grammes d’alcool dans le sang, il y a ainsi « deux fois plus de risques de faire un black-out », souligne Mickael Naassila. De la même manière, plus on consomme vite cet alcool, plus le risque est grand.

 

Mais impossible pour autant de déterminer des seuils critiques universels, car « nous ne sommes pas égaux face au black-out alcoolique », reconnaît le chercheur de l’université d’Amiens. Sexe, âge, corpulence, état de fatigue, satiété, consommation d’autres substances altérant notre organisme : il existe de nombreux facteurs qui déterminent notre réaction à l’alcool à un temps T.

 

 

 

Les femmes sont ainsi plus sujettes aux pertes de mémoire, selon les études. Car même à poids et corpulence identique à un homme, elles présentent une masse graisseuse plus importante qui ne permet pas une aussi bonne absorption de l’alcool. En outre, le risque de black-out est accentué dans les phases prémenstruelles et ovulatoires. En 2017, un groupe de chercheurs de l’université de Palo Alto en Californie a ainsi publié une étude montrant que les femmes ont une amnésie en buvant en moyenne trois verres de moins que les hommes.

 

Génétique et tempéraments

 

Les études ont également pu mettre en lumière certaines prédispositions génétiques à ces amnésies. Ainsi, les individus dont la mère a eu un passé alcoolique sont plus à risque, selon une étude de 2015. 

 

Enfin, les « traits de personnalité et les tempéraments jouent », affirme Mickael Naassila. Parmi les sujets étudiés, ceux qui montrent le plus fort « penchant social pour la fête », et qui donc sont moins inhibés sur leur manière de consommer de l’alcool, ont tendance à être plus sujets aux pertes de mémoire.Les études montrent en outre que plus on vit de black-out, plus on est amené à en vivre. « Il y a plus de sensibilité sous réalcoolisation », résume Mickael Naassila.

 

Dès lors, se pose évidemment la question des conséquences de ces épisodes. Pour l’heure, aucune différence de compétences mémorielles n’a été prouvée sur les sujets à jeun ayant expérimenté des black-out. Pourtant, « on pressent qu’il y a des conséquences », affirme Aaron White, qui répète que « dans le domaine, beaucoup de choses sont encore largement méconnues ».

 

Risques de viols ou d’agressions

 

Sur les corps, c’est une autre histoire. Les black-out alcooliques représentent un risque majeur pour les individus, et multiplient les risques de viols ou d’agressions. Une étude a ainsi montré que les femmes qui connaissent des black-out sont plus susceptibles d’être impliquées dans « des comportements sexuels risqués ». A ce sujet d’ailleurs, la législation reste très floue, et il n’est pas toujours facile de prouver que la victime était non consciente, alors qu’elle n’agissait pas nécessairement comme telle.

 

Pour Anne C., les black-out étaient devenus au fil des ans comme « un mauvais pote de soirée ». Ils revenaient à un rythme irrégulier, « parfois une fois par mois, puis plus rien pendant six mois ». « Sans cohérence aucune », dit cette Parisienne d’adoption qui travaille dans le milieu de la restauration :

 

« Il y a des fois où ça m’arrivait alors que j’avais clairement moins bu qu’à d’autres soirées où je me souvenais de tout. »

 

A 34 ans, elle a connu plusieurs fois « le flip total au réveil ». Ne pas savoir où on est, avec qui, se sentir « comme une machine dont tous les rouages sont cassés » : la serveuse reconnaît « s’être mise en grave danger plusieurs fois ». Même si elle se disait « surprise parfois des compétences qu’on garde ». Jamais ces soirs-là elle n’a oublié de prendre sa pilule – même si elle n’avait aucun souvenir de l’avoir prise.

 

A force, Anne C. a commencé à changer sa manière de boire. « Clairement, je contrôle beaucoup plus ma consommation. Je compte les verres et je n’ai pas eu de black-out depuis plus d’un an, dit-elle. Mais j’ai le sentiment que rien ne peut complètement m’en protéger. »

 

Charlotte Chabas




 In 1995, a first researcher, Donald W. Goodwyn, conducted a study among his medical students on occasional blackouts.



It was a "heavy and sticky" heat that woke her up. In the dark blue tent, the air had become unbreathable. "It was like waking up from the dead," recalls Isabelle H., then a 23-year-old marketing student. Next to her is a stranger sleeping. Then begins for the young one-night stander "the flood of unanswered questions". How did it get there? Who is the person next to her? Where are the friends she spent the evening with? And by the way, when did this evening end? How? How?



It was two years ago: his "first and only blackout", a partial or total amnesia due to alcohol consumption. And with it, the feeling "that everything is falling apart". "Like in a cartoon, when the character continues to run after the cliff has ended, and falls into the void," says the young woman, who admits to having had "the fear of her life" that morning.



However, she did not "feel like she had drunk a lot". And doesn't understand how she could have "gone so far in a spin". Of course, her friends found her "particularly playful and dancing". But didn't she continue to talk to them, to take initiatives? And then they had "all drank the same thing", so why worry? "Today, what happened remains a mystery to me," admits Isabelle H., who has never experienced any new alcohol-related amnesia, and keeps even more "a sense of unreality.



Recent studies



"We are still in the early stages of research on this subject," humbly acknowledges Mickael Naassila, director of the Alcohol and Drug Dependency Unit at the University of Picardy. First, because the subject of study is relatively recent:



"For a long time, it was believed that only alcoholics were subject to this kind of amnesic episode. »



It was only in 1995 that a first researcher, Donald W. Goodwin, conducted a study among his first-year medical students: 33% of these occasional drinkers said they had experienced at least one blackout. In the 2000s, the extent of the phenomenon was highlighted by epidemiological surveys asking young people about their alcohol consumption. In 2016, a British survey showed that 20% of a sample of 2,140 teenagers had experienced some form of amnesia in the last six months after drinking alcohol.







Information that the brain can no longer encode



To what are they due? Studies show that alcohol strongly disrupts the hippocampus, the brain area that plays a major role in memory processes. The subject lives with information that his brain can no longer encode and store in the form of long-term memories. "It's like a cassette for which you would have stopped pressing the record button for a while," says Aaron White, a neuroscientist at Duke University Medical Center in North Carolina.



The blackout has nothing to do with a loss of consciousness, such as an ethyl coma. There is no external sign to anticipate it - the person retains some control over his or her motor skills, even if it is often degraded. For Arthur N., a 31-year-old architect regularly subject to blackouts, this is "the most bizarre aspect of these moments". "It's evening, it's feeling pretty good, and all of a sudden we wake up and others tell us what we did. It's like a sleepwalking crisis," says the man who says he "wonders a lot" about what makes him "so sensitive to[his] friends".



Women more prone to



Here again, the subject is difficult to study, recalls Mickael Naassila:



"It should be possible to start a study at the very beginning of alcohol consumption, to follow these phases of amnesia when they occur and not after the fact, when the subject does not necessarily remember. This poses ethical difficulties, as well as financial resources. »



"Double the risk" from 3 grams of alcohol in the blood



However, science is gradually succeeding in establishing some of the driving forces. "It's linear, the more you drink, the more damage you have to the hippocampus," says American researcher Aaron White. From 3 grams of alcohol in the blood, there is thus "twice as much risk of blackout", Mickael Naassila points out. Similarly, the faster you drink this alcohol, the greater the risk.

But it is impossible to determine universal critical thresholds, because "we are not equal in the face of alcoholic blackouts", acknowledges the researcher from the University of Amiens. Sex, age, build, fatigue, satiety, consumption of other substances that affect our body: there are many factors that determine our response to alcohol at a time T.








Women are more prone to memory loss, according to studies. Because even at the same weight and build as a man, they have a higher fat mass which does not allow for as good an absorption of alcohol. In addition, the risk of blackout is increased in the premenstrual and ovulatory phases. In 2017, a group of researchers at the University of Palo Alto in California published a study showing that women have amnesia by drinking on average three glasses less than men.




Genetics and temperaments




Studies have also been able to highlight certain genetic predispositions to these amnesias. Thus, individuals whose mothers have had a history of alcohol abuse are at greater risk, according to a 2015 study.




Finally, "personality traits and temperaments play a role," says Mickael Naassila. Among the subjects studied, those who show the strongest "social inclination to party", and who are therefore less inhibited about the way they consume alcohol, tend to be more prone to memory loss and studies also show that the more blackouts you live, the more you are likely to live off them. "There is more sensitivity under recooling," says Mickael Naassila.




Therefore, the question of the consequences of these episodes is obviously raised. For the time being, no difference in memory skills has been proven on fasting subjects who have experienced blackouts. Yet, "we feel that there are consequences," says Aaron White, who repeats that "in this field, many things are still largely unknown.




Risks of rape or assault




On the bodies, it's another story. Alcoholic blackouts represent a major risk for individuals, and increase the risk of rape or assault. One study showed that women who experience blackouts are more likely to be involved in "risky sexual behaviour". On this subject, moreover, the legislation remains very vague, and it is not always easy to prove that the victim was unconscious, even though she did not necessarily act as such.




For Anne C., over the years, blackouts had become "a bad evening friend". They came back at an irregular rate, "sometimes once a month, then nothing for six months". "Without any coherence," says this Parisian by adoption who works in the restaurant industry:




"Sometimes it happened to me when I clearly had less to drink than at other parties where I remembered everything. »




At 34, she experienced several times "the total flip on waking up". Not knowing where you are, with whom, feeling "like a machine with broken gears": the waitress admits that she "put herself in serious danger several times". Even if she said she was "sometimes surprised by the skills we keep". Never those nights did she forget to take her pill - even though she had no memory of taking it.




By dint of force, Anne C. began to change the way she drank. "Clearly, I have much more control over my consumption. I count glasses and I haven't had a blackout in over a year," she says. But I have a feeling that nothing can completely protect me from it. »




Charlotte Chabas 

 

 

 

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Le «binge drinking» provoque des altérations dans le cerveau des adolescents / Binge drinking causes alterations in the brains of teenagers

Le «binge drinking» provoque des altérations dans le cerveau des adolescents / Binge drinking causes alterations in the brains of teenagers

Des chercheurs espagnols et portugais apportent la preuve objective des altérations cérébrales précoces induites par la pratique de plus en plus répandue chez les jeunes de la «biture express». Spanish and Portuguese researchers provide objective evidence of the early brain damage induced by the increasingly widespread practice among young people of "express booze".

                


«Binge drinking»? La langue française peine encore à traduire au mieux ce phénomène: au choix, «biture express», «chaos éthylique», «alcool défonce», «beuverie effrénée», «alcoolisation massive», «hyper-alcoolisation», «intoxication alcoolique aiguë» ou «alcoolisation paroxystique intermittente».Il s’agit, dans tous les cas, d’une consommation importante de boissons alcooliques, sur une courte période de temps, par épisodes ponctuels ou répétés. Un comportement où l'état d’ivresse est recherché rapidement.

 

Tester ses limites

 

Dans plusieurs pays anglo-saxons le binge drinking est considéré comme un problème majeur de santé publique. Il en va de même, progressivement, dans les pays du Vieux Continent qui estimaient il y a peu encore ne pas être véritablement concernés.

 

Souvent associé à des comportements de groupe (fêtes d'étudiants, regroupements de jeunes avec beuveries sur la voie publique, etc.), ce phénomène concerne pour l’essentiel des jeunes qui joueraient à «tester leurs limites», ignorant le plus souvent que cette conduite peut entraîner un coma éthylique mortel (soit entre 2 et 4 g d'alcool par litre de sang). On parle là encore de «comportement ordalique», comportement à haut risque motivé par un besoin de «jouer avec la mort» ou de «revitaliser son existence».

 

Les psychologues évoquent quant à eux d'une «appétence traumatophilique», puissant désir de valider son existence via des conduites à haut risque. Des sociologues y voient «un entre-soi générationnel, rituel d’intégration au groupe hors du regard des adultes». On peut également y percevoir le symptôme éclairant de situations de détresse adolescente.

 

Les spécialistes discutent encore du nombre de boissons nécessaires pour atteindre cet «état hyper-alcoolique». Aux Etats-Unis, le National Institute on Alcohol Abuse and Alcoholism (NIAAA) estime qu’il correspond, pour un adulte, à la consommation (minimale) de cinq verres standards (hommes) ou de quatre verres (femmes), sur une durée de deux heures environ. Boire deux à trois fois ces quantités en une seule occasion est qualifié d’extreme drinking.

 

«L’industrie alcoolière a développé des produits adaptés aux jeunes: des noms, des goûts exotiques, des packagings sophistiqués, branchés, modernes, collectors… », observent deux spécialistes français des addictions dans un récent et précieux ouvrage1. « Les binges drinkers consomment des premix ou alcopops, des alcools forts, purs ou mélangés […] La binge-drinkorexie ou alcoolorexie est un autre phénomène constaté chez les adolescentes et les étudiantes. Il s’agit de conduites de restriction alimentaire combinées à des épisodes de binge drinking. Ces filles multiplient les épisodes de jeûne pour affiner leur silhouette (car l’alcool, très calorique, n’est pas sans conséquence sur la balance). Etre ivre encore plus vite (et économiser de l’argent pour le dépenser dans l’alcool). Manger moins pour être plus vite défoncée! Il semblerait qu’un tiers de ces jeunes filles aient leur première relation sexuelle sous l’emprise de l’alcool. On s’interrogera sur la question du désir réel…»

 

Activité cérébrale affectée

 

Les questions des risques immédiats (conduite automobile en état d’ivresse, violences, viols, rapports sexuels non protégés, etc.) et décalés (instauration d’une dépendance à l’alcool) ne sont pas les seules. Ingérer de grandes quantités d'alcool, quelles conséquences cérébrales? Des études préliminaires avaient déjà fait état de lésions cérébrales. D’autres avaient associé la pratique du «binge drinking» à une série de déficits neurocognitifs, de mauvais résultats scolaires et des comportements à risque.

 

Une nouvelle étude récemment publiée dans une revue spécialisée2 établit un parallèle entre cette pratique et les conséquences d’imprégnations alcooliques chroniques sur l'attention ou la mémoire de travail. Menée par un groupe de chercheurs portugais et espagnols, cette étude a été conduite auprès d’un groupe de 80 étudiants de première année d'université. Ces derniers ont renseigné par questionnaire ce qu’il en était de leurs habitudes de consommation. Leur activité électrique dans différentes zones du cerveau a été évaluée. Des analyses qui établissent que par rapport aux abstinents ou aux buveurs raisonnables, les adeptes du binge drinking présentent une altération de leur activité cérébrale; et ce même au repos.

 

Les analyses révèlent notamment des mesures significativement plus élevées de paramètres électrophysiologiques spécifiques (oscillations bêta et thêta) dans le lobe temporal droit et le cortex occipital bilatéral. Les altérations de l’activité du cerveau au repos observées par ces chercheurs (témoins d’une réduction de la capacité de réponse aux stimuli externes et de traitement de l'information) apparaissent comme similaires à celles relevées dans le cerveau d’adultes alcooliques chroniques.

 

 

 

 Jean-Yves Nau

 

 1. «Tous addicts, et après?» des Drs William Lowenstein et Laurent Karila. Editions Flammarion.

 

2. «The Brain of Binge Drinkers at Rest: Alterations in Theta and Beta Oscillations in First-Year College Students with a Binge Drinking Pattern», Frontiers in Behavioral Neuroscience, doi: 10.3389/fnbeh.2017.00168.



 

 "Binge drinking"? The French language still has difficulty in expressing this phenomenon as well as it can: "express drinking", "ethyl chaos", "high alcohol", "unbridled drinking", "massive drinking", "hyper-alcoholisation", "acute alcohol poisoning" or "intermittent paroxysmal alcohol poisoning", all of which are major drinks consumed over a short period of time, in occasional or repeated episodes. Behaviour where drunkenness is quickly sought.



Test your limits



In several Anglo-Saxon countries, binge drinking is considered a major public health problem. The same is gradually being done in the countries of the Old Continent, which until recently thought they were not really concerned.



Often associated with group behaviour (student parties, youth groups with street drinking, etc.), this phenomenon mainly concerns young people who would play at "testing their limits", most often ignoring that this conduct can lead to a fatal alcohol coma (between 2 and 4 g of alcohol per litre of blood). Again, this is referred to as "ordalic behaviour", high-risk behaviour motivated by a need to "play with death" or "revitalize one's life".



Psychologists refer to a "traumatophilic appetite", a strong desire to validate one's existence through high-risk behaviours. Sociologists see it as "a generational inter-self, a ritual of integration into the group outside the eyes of adults". One can also perceive the enlightening symptom of adolescent distress situations.



Experts are still discussing the number of drinks needed to reach this "hyper-alcoholic state". In the United States, the National Institute on Alcohol Abuse and Alcoholism (NIAAA) estimates that it corresponds, for an adult, to the (minimum) consumption of five standard glasses (men) or four glasses (women), over a period of about two hours. Drinking two or three times these quantities on a single occasion is called extreme drinking.



"The alcohol industry has developed products adapted to young people: names, exotic tastes, sophisticated, trendy, modern, collector's packaging...", observe two French addiction specialists in a recent and precious book1. "Binges drinkers consume premixes or alcopops, strong alcohols, pure or mixed [...] Binge-drinkorexia or alcoholorexia is another phenomenon observed among teenagers and students. These are food restriction behaviours combined with binge drinking episodes. These girls multiply the episodes of fasting to refine their silhouette (because alcohol, very caloric, is not without consequence on the balance). Get drunk even faster (and save money to spend on alcohol). Eat less to get high faster! It seems that a third of these young girls have their first sexual intercourse under the influence of alcohol. We will ask ourselves about the question of real desire..."



Affected brain activity



The issues of immediate (drunk driving, violence, rape, unprotected sex, etc.) and delayed (alcohol dependence) risks are not the only ones. Ingesting large quantities of alcohol, what are the consequences for the brain? Preliminary studies had already reported brain damage. Others had associated the practice of binge drinking with a series of neurocognitive deficits, poor academic performance and risky behaviours.



A new study recently published in a specialized journal2 draws a parallel between this practice and the consequences of chronic alcoholic impregnations on attention or working memory. Conducted by a group of Portuguese and Spanish researchers, this study was conducted with a group of 80 first-year university students. The latter provided information by questionnaire on their consumption habits. Their electrical activity in different areas of the brain was evaluated. Analyses that show that compared to abstinent or reasonable drinkers, binge drinking enthusiasts show an alteration in their brain activity, even at rest.



In particular, the analyses reveal significantly higher measurements of specific electrophysiological parameters (beta and theta oscillations) in the right temporal lobe and bilateral occipital cortex. The alterations in resting brain activity observed by these researchers (evidence of reduced ability to respond to external stimuli and process information) appear to be similar to those found in the brains of adult chronic alcoholics.







Jean-Yves Nau





 

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Alcoolisme et risque de démences / Alcoholism and risk of dementia

Alcoolisme et risque de démences / Alcoholism and risk of dementia

La consommation excessive d’alcool est associée à un triplement du risque de démences en général et un doublement de celui de développer la maladie d’Alzheimer, ce qui en ferait un facteur de risque modifiable majeur pour ces maladies. Telle est la conclusion d’une étude de l’Inserm menée en collaboration avec des chercheurs canadiens via le groupe de recherche QalyDays[1]. A partir de données exhaustives des hospitalisations en France entre 2008-2013, les chercheurs ont étudié l’association entre alcoolisme et démences. Leurs travaux parus dans The Lancet Public Health confirment l’importance de renforcer la prévention contre l’abus d’alcool. Excessive alcohol consumption is associated with a tripling of the risk of dementia in general and a doubling of the risk of developing Alzheimer's disease, making it a major modifiable risk factor for these diseases. This is the conclusion of an Inserm study conducted in collaboration with Canadian researchers through the QalyDays research group[1]. Based on exhaustive data on hospitalizations in France between 2008-2013, the researchers studied the association between alcoholism and dementia. Their work in The Lancet Public Health confirms the importance of strengthening alcohol abuse prevention.


 

La liste des troubles associés à l’alcool s’allonge encore. Après les problèmes hépatiques, cardiovasculaires et les cancers, les démences font maintenant partie du lot. Une consommation excessive d’alcool correspondant à six verres ou plus par jour pour les hommes et quatre pour les femmes s’est en effet trouvée associée à un triplement du risque de démences. Celles-ci incluent les démences précoces enregistrées avant 65 ans et directement attribuables à l’alcool de type syndrome de korsakoff, les démences vasculaires résultant par exemple d’accidents vasculaires cérébraux et enfin, les démences neurodégénératives de type Alzheimer.

 

Alors que quelques études suggèrent un effet protecteur d’une consommation faible à modérée d’alcool sur la fonction cognitive, peu de données permettent de travailler sur des consommations élevées. Les personnes alcooliques refusent en effet, dans la plupart des cas, de participer à des cohortes de recherche médicale. Pour contourner ce problème, les chercheurs ont utilisé les informations issues du Programme de Médicalisation des Systèmes d’Information qui renseigne toutes les causes d’hospitalisation. A partir de cette base, ils ont identifié 31,6 millions d’adultes hospitalisés entre 2008 et 2013 dont 1,3 million étaient affectés de démences et 950 000 présentaient une consommation excessive d’alcool (dont 85% une dépendance). Après exclusion des cas de démences attribuables à une pathologie bien identifiée, les chercheurs ont retrouvé une consommation excessive d’alcool dans 57% des démences précoces et 8% de celles survenues après 65 ans. Alors que pour l’ensemble des adultes hospitalisés, les taux d’alcoolisme étaient évalués à 6,2% chez les hommes et 1,5% chez les femmes.

 

Selon l’analyse de cette cohorte, la consommation excessive d’alcool est associée à un triplement du risque de démence et un doublement du risque en ce qui concerne la maladie d’Alzheimer. Après avoir pris en compte les autres facteurs de risque de démence, les chercheurs estiment qu’il s’agit d’un facteur de risque de démence (modifiable) , pouvant être considéré comme le plus important devant le tabagisme ou l’hypertension artérielle.

 

« Nous pensons que l’alcool pourrait précipiter la survenue de ces maladies et accélérer leur progression en augmentant les dommages structurels et fonctionnels dans le cerveau, expliquent les auteurs de ce travail Carole Dufouil, directrice de recherche à l’Inserm et Michaël Schwarzinger (Translational Health Economics Network (THEN) et chercheur affilié à l’Unité Inserm 1137 IAME “infection, antimicrobiens, modélisation, évolution”). Mais les mécanismes possibles sont nombreux et restent à clarifier. Cette étude interpelle donc une nouvelle fois sur les dangers de l’alcool, suggérant que des mesures préventives supplémentaires pourraient contribuer à réduire le risque de démences et leur coût financier et sociétal », clarifie Carole Dufouil.

 

Ces travaux permettent par ailleurs de confirmer l’intérêt de travailler avec des bases de santé. « Le fait de mettre en évidence un problème de santé majeur grâce à l’utilisation de ce type de données est très prometteur en raison de l’ouverture de ces bases dans le cadre de la loi de modernisation du système de santé », se réjouit Carole Dufouil. Les chercheurs ont désormais accès au « système national des données de santé » qui regroupe plusieurs bases de santé[2] « Les données utilisées dans notre étude sont imparfaites puisqu’elles n’ont pas été collectées spécifiquement pour nos travaux. Elles ne permettent pas par exemple, d’avoir une mesure précise de la consommation d’alcool, ni du seuil au-delà duquel le risque de démence devient élevé. Mais le nombre de cas est si important que la puissance statistique gomme beaucoup de ces imperfections. C’est le gros avantage de travailler à partir de ces bases », concluent Michaël Schwarzinger et Carole Dufouil.

 

[1] Le groupe QalyDays étudie les déterminants de l’espérance de vie et de l’espérance de vie sans dépendance. Il associe deux équipes Inserm au sein des unités mixtes 1137 “ IAME “infection, antimicrobiens, modélisationévolution” (Inserm-Université Paris Diderot) et 1219 “Bordeaux population health research center” (Inserm-Université de Bordeaux).

 

[2] (Données SNIIRAM de l’assurance maladie, base PMSI sur l’activité des établissements de santé, base CepiDC sur les causes de décès ou encore données liées au handicap, etc.).





The list of alcohol-related disorders is growing. After liver problems, cardiovascular problems and cancers, dementias are now part of the picture. Excessive alcohol consumption of six or more drinks per day for men and four for women has been associated with a threefold increase in the risk of dementia. These include early dementias recorded before age 65 and directly attributable to alcohol of the korsakoff syndrome type, vascular dementias resulting, for example, from strokes, and neurodegenerative dementias of the Alzheimer type.



While some studies suggest a protective effect of low to moderate alcohol consumption on cognitive function, there is little data to work with high alcohol consumption. In most cases, alcoholics refuse to participate in medical research cohorts. To overcome this problem, the researchers used information from the Information Systems Medicalization Program, which provides information on all causes of hospitalization. From this database, they identified 31.6 million adults hospitalized between 2008 and 2013, 1.3 million of whom were affected by dementia and 950,000 of whom had excessive alcohol consumption (85% of whom were dependent). Excluding cases of dementia due to a well-identified pathology, researchers found excessive alcohol consumption in 57% of early dementias and 8% of those after age 65. While for all hospitalized adults, alcoholism rates were estimated at 6.2% for men and 1.5% for women.


According to the analysis of this cohort, excessive alcohol consumption is associated with a tripling of the risk of dementia and a doubling of the risk of Alzheimer's disease. After taking into account the other risk factors for dementia, the researchers consider that this is a (modifiable) risk factor for dementia, which can be considered the most important in comparison to smoking or high blood pressure.



"We believe that alcohol could precipitate the occurrence of these diseases and accelerate their progression by increasing structural and functional damage in the brain," explain the authors of this work, Carole Dufouil, research director at Inserm and Michaël Schwarzinger (Translational Health Economics Network (THEN) and researcher affiliated with the Inserm 1137 IAME Unit "infection, antimicrobials, modelling, evolution"). But the possible mechanisms are numerous and remain to be clarified. This study therefore once again highlights the dangers of alcohol, suggesting that additional preventive measures could help reduce the risk of dementia and its financial and societal cost," clarifies Carole Dufouil.



This work also confirms the value of working with health databases. "The fact of highlighting a major health problem through the use of this type of data is very promising because of the opening of these databases as part of the law to modernize the health system," says Carole Dufouil. Researchers now have access to the "national health data system" which includes several health databases[2] "The data used in our study are imperfect because they were not collected specifically for our work. For example, they do not provide an accurate measure of alcohol consumption or the threshold above which the risk of dementia becomes high. But the number of cases is so large that the statistical power erases many of these imperfections. That's the big advantage of working from these bases," conclude Michaël Schwarzinger and Carole Dufouil.



1] The QalyDays group is studying the determinants of life expectancy and life expectancy without dependency. It brings together two Inserm teams within the mixed 1137 "IAME" units "infection, antimicrobials, modelling, evolution" (Inserm-Université Paris Diderot) and 1219 "Bordeaux population health research center" (Inserm-Université de Bordeaux).



2] (SNIIRAM health insurance data, PMSI database on the activity of health care institutions, CepiDC database on causes of death or data related to disability, etc.).

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Quand les Français donnaient de l'alcool à leurs enfants pour les rendre « plus forts » / When the French gave alcohol to their children to make them "stronger"

Quand les Français donnaient de l'alcool à leurs enfants pour les rendre « plus forts » / When the French gave alcohol to their children to make them "stronger"

Au XIXe siècle, la consommation d'alcool – et notamment de vin – est largement répandue chez les enfants. Un fléau alors difficile à combattre, dans une France imprégnée par sa longue tradition vinicole. In the 19th century, the consumption of alcohol - and especially wine - was widespread among children. A scourge that was difficult to combat at the time, in a France steeped in its long wine-growing tradition.


 

C’est une époque révolue mais pas si lointaine que celle où la consommation d’alcool faisait partie du quotidien des enfants. Car, pendant longtemps, un certain nombre de Français semblent convaincus : l’alcool, et en particulier le vin, fortifie et aide à rester en bonne santé.

 

À la fin du règne de Louis XV, en 1773, on peut lire dans La Gazette du Commerce

 

« Dans les pays de vignobles, les maladies populaires finissent en automne ; les petites véroles sont alors moins dangereuses ; il y a même des raisons de croire que les raisins qu'on mange et le vin qu'on boit peuvent en préserver. Le Peuple se refait, chaque année, avec ce fruit et le vin doux.

 

Un enfant, sans nourrice, a été nourri avec du vin doux ; il est très sain et très robuste. »

 

 

 

Un siècle plus tard, en 1866, Louis Pasteur, fort de la mise au point du procédé de pasteurisation qui tue microbes et bactéries, ira même jusqu'à affirmer dans son célèbre ouvrage Études sur le vin que « le vin peut être à bon droit considéré comme la plus saine, la plus hygiénique des boissons ».

 

 

 

De fait, la consommation d'alcool – vin, mais aussi liqueurs et eaux-de-vie – est en constante augmentation tout au long du XIXe siècle. En 1872, l'Association française contre les boissons alcooliques se réunit pour la première fois à l'Académie de médecine. Dans le même temps, la recherche sur les méfaits de l'alcool, encore balbutiante, avance timidement.

 

En 1896, l’Académie de médecine rapporte le cas, pas si exceptionnel dans la France de l’époque, de deux adolescentes ayant commencé à boire du vin dès leurs premières années. Les conséquences sont, sans surprise, effrayantes :

 

« Il s’agit de deux jeunes filles âgées de 14 ans. La première commença à prendre du vin aux repas à l’âge de 3 ans ; la seconde à 2 ans. Chez toutes deux, on constate l'existence d’une affection du foie, la “cirrhose”, qui se caractérise par le ratatinement de cet organe et sa dégénérescence. 

 

Mais voici qui est plus intéressant : la première malade présente des symptômes de croissance imparfaite, l’autre, des paralysies diverses coïncidant, aussi, avec un arrêt de croissance tel que sa taille n'est que de 94 centimètres, et ses membres si grêles, qu’ils ne peuvent supporter le poids du corps. En somme, ces jeunes filles de 14 ans paraissent avoir tout au plus 6 ans. 

 

Inutile de dire que dans les deux cas on a administré du vin aux enfants “pour les fortifier”. 

 

Bien mieux, chez la seconde – la plus malade –, comme le vin était très mal supporté, la mère a cru devoir terminer chaque repas par un petit verre de crème de menthe, afin de faire digérer le vin de Bordeaux. [...]

 

Puissent ces funestes exemples être une leçon pour les jeunes mères trop faibles pour contrarier les désirs et les caprices des bébés. »

 

Malgré des campagnes de sensibilisation de la part de l'Académie de médecine, le fléau de l’alcoolisme infantile ne cesse de faire des ravages, notamment dans les milieux ouvriers, comme s'en indigne en 1907 le quotidien catholique et garant de « l'ordre moral » La Croix :

 

« D’après M. le Dr Tourdot, à Rouen on donne aux enfants du café mélangé d’eau-de-vie dès l’âge de six à huit mois ; on leur donne même le cognac à la cuillère pour les endormir... 

 

Dans le milieu ouvrier, le premier remède à administrer à l’enfant malade, surtout s’il est pris de convulsions, c’est l’eau-de-vie ! [...]

 

L’enfant du second âge s’en va à l’école après avoir pris sa ration de cognac ; et il en prend encore à chaque repas. Il est des mères qui, en guise de provisions pendant la journée d’école, mettent dans le panier de l’enfant une petite bouteille de cognac et du pain pour faire la trempette. 

 

Les parents sont convaincus que l’alcool donne de la force. Il retire en effet l’appétit et par cela même ils s’imaginent qu’il nourrit. Ces enfants mangent à peine et deviennent des candidats à la tuberculose.

 

Dans les campagnes, c’est encore pire, si c’est possible ; les commères s’assemblent et absorbent plusieurs fois par jour de la bistouille”, c’est-à-dire du café mélangé d’un tiers d’alcool et les enfants présents ont leur part du brevage toxique. L’enfant devient aussi nécessairement alcoolique : dès douze ans, il ne rêve plus que bistouille . Telles les mères, tels les enfants. »

 

 Même constat en 1915 dans L'Écho de Paris, dont la ligne éditoriale est également conservatrice :

 

« “Comment, tu ne sais pas ce que c'est ? Vrai ? Tu n'as jamais été saoul ?”... 

 

Et le garçon de douze ans, qui, lui, “sait ce que c'est”, toise d'un air supérieur son petit camarade humilié et penaud... 

 

Ces aimables “propos d'enfants”, vous savez bien que je ne les-invente pas : à la campagne ou dans les faubourgs, vous avez entendu les pareils... douze ans, d'ailleurs, combien d'enfants n'ont pas attendu douze ans pour faire connaissance avec l'alcool : il y a des régions où l'on donne aux bébés, le matin, un croûton de pain trempé dans un peu de goutte, en guise de petit déjeuner, et pour qu'ils se tiennent tranquilles... »

 

Et le journaliste de rapporter les propos glaçants d'une mère de famille désespérée, offrant au lecteur de classe moyenne une vision morbide du monde ouvrier :

 

« Le dimanche, quand le père est de bonne humeur, il emmène ses aînés (neuf et huit ans) faire un tour, et cela veut dire : aller faire une partie avec des camarades dans un débit quelconque en buvant des apéritifs, et tout ce petit monde, ça ne les amuse pas de regarder leurs papas jouer.

 

Alors on leur donne un jeu de dominos, et un peu d'apéritif dans un verre, apéritif peut-être plus inoffensif que celui de leurs pères, mais qui leur fait autant de mal parce qu'ils sont plus jeunes ; et cela me navre, monsieur, de voir mes enfants revenir de leur promenade nerveux et maussades en attendant qu'ils deviennent pires, car les bons conseils de la mère n'ont pas toujours raison... [...]

 

Ne croyez pas que j'exagère, monsieur, cela se passe couramment ainsi dans nos milieux ouvriers. »

 

Si l'alcool est donc de plus en plus pointé du doigt à mesure que la recherche progresse, le vin reste communément considéré comme une boisson sinon saine, du moins quasi-inoffensive, tradition française oblige. Il faut attendre les années 1930 pour que les médecins montent au créneau.

 

En 1933, le journal – alors – d'inspiration socialiste L'Œuvre dénonce ainsi « la propagande » en faveur du vin faite dans les écoles :

 

« M. Vezzet est venu hier avec la permission du président de l'Académie s'élever contre la propagande qui serait faite dans certaines écoles en faveur du vin. On y distribue, paraît-il, des bons points aux élèves qui boivent le plus de vin, et ces bons points portent l'image de Pasteur. 

 

Plusieurs membres de l'Académie et notamment le docteur Roux se sont émus d'apprendre la possibilité de telles pratiques. La question a été renvoyée à la commission d'alcoolisme. »

 

Il faudra attendre 1956 pour qu’une circulaire interdise de servir toute boisson alcoolisée dans les écoles publiques aux enfants de moins de 14 ans.

 

 Marina Bellot







It is a bygone era, but not so far away as when alcohol consumption was part of children's daily lives. For a long time, a certain number of French people seemed convinced: alcohol, and in particular wine, strengthened and helped to maintain good health.



At the end of the reign of Louis XV, in 1773, we can read in La Gazette du Commerce:



"In wine-growing countries, popular diseases end in autumn; small poxes are then less dangerous; there is even reason to believe that the grapes we eat and the wine we drink can preserve them. The People are redone, every year, with this fruit and the sweet wine.



A child, without a nanny, has been fed sweet wine; he is very healthy and very robust. »







A century later, in 1866, Louis Pasteur, with the development of the pasteurization process that kills germs and bacteria, went so far as to affirm in his famous book Études sur le vin that "wine can rightly be considered as the healthiest, most hygienic of all beverages".







In fact, the consumption of alcohol - wine, but also liqueurs and eaux-de-vie - was constantly increasing throughout the 19th century. In 1872, the French Association against Alcoholic Beverages met for the first time at the Academy of Medicine. At the same time, research on the harmful effects of alcohol, which is still in its infancy, is progressing timidly.



In 1896, the Académie de médecine reported the case, not so exceptional in France at the time, of two teenage girls who had begun drinking wine in their early years. The consequences are, not surprisingly, frightening:



"These are two young girls aged 14. The first began drinking wine with meals at the age of 3 years; the second at 2 years. In both, there is a liver disorder called "cirrhosis", which is characterized by the shrivelling of the liver and its degeneration.



But here is more interesting: the first patient presents symptoms of imperfect growth, the other, various paralyses coinciding, too, with a growth stoppage such that his height is only 94 centimeters, and his limbs so thin, that they can not support the body weight. In short, these 14-year-old girls seem to be at most 6 years old.



Needless to say, in both cases the children were given wine "to strengthen them".



Much better, in the second - the sickest - case, as the wine was very badly tolerated, the mother thought she had to finish each meal with a small glass of mint cream in order to digest the Bordeaux wine. [...]



May these disastrous examples be a lesson for young mothers who are too weak to thwart babies' desires and whims. »



Despite awareness campaigns by the Academy of Medicine, the scourge of child alcoholism continues to wreak havoc, particularly in working class circles, as the Catholic daily newspaper, guarantor of the "moral order" La Croix, expressed indignation in 1907:



"According to Dr. Tourdot, in Rouen children are given coffee mixed with brandy from the age of six to eight months; they are even given cognac with a spoon to put them to sleep...



In the working class environment, the first remedy to administer to sick children, especially if they have convulsions, is eau-de-vie! [...]



The second age child goes to school after taking his cognac ration; and he still takes it with each meal. There are mothers who, as provisions during the school day, put a small bottle of cognac and bread in the child's basket for dipping.



Parents are convinced that alcohol gives strength. It takes away the appetite and by this very fact they imagine that it nourishes. These children barely eat and become candidates for tuberculosis.



In the countryside, it is even worse, if possible; the gossips gather and absorb "scalpel", i. e. coffee mixed with a third alcohol, several times a day and the children present have their share of the toxic brew. The child also necessarily becomes an alcoholic: from the age of twelve, he only dreams of "scalpel". Like mothers, like children. »



The same observation was made in 1915 in L'Écho de Paris, whose editorial line is also conservative:



"How, you don't know what it is? True? You've never been drunk?"..."...



And the twelve-year-old boy, who "knows what it is", looks at his humiliated and ashamed little friend with a superior look...


You know well that I do not invent these kind "children's words": in the countryside or in the suburbs, you have heard the same... twelve years, moreover, how many children have not waited twelve years to get to know alcohol: there are regions where babies are given, in the morning, a crust of bread soaked in "a little drop", as a breakfast, and so that they can be kept quiet... »



And the journalist to report the chilling words of a desperate mother of a family, offering the middle-class reader a morbid vision of the working class world:



"On Sundays, when the father is in a good mood, he takes his elders (nine and eight years old) for a walk, and that means: going for a game with friends in some kind of pub while drinking aperitifs, and all these people, it doesn't amuse them to watch their fathers play.



So we give them a set of dominoes, and a little bit of aperitif in a glass, an aperitif perhaps more harmless than their fathers', but which hurts them as much because they are younger; and it pains me, sir, to see my children come back from their nervous and moody walk until they get worse, because the mother's good advice is not always right... [...]



Don't think I'm exaggerating, sir, it's common in our working class circles. »



If alcohol is therefore increasingly pointed out as research progresses, wine is commonly considered as a healthy drink, if not healthy, at least almost harmless, due to the French tradition. It was not until the 1930s that doctors took up the challenge.



In 1933, the then socialist-inspired newspaper L'Œuvre thus denounced the "propaganda" in favour of wine in schools:



"Mr. Vezzet came yesterday with the permission of the President of the Academy to protest against the propaganda that would be made in some schools in favour of wine. It is said that good points are distributed to the students who drink the most wine, and these good points carry the image of Pasteur.



Several members of the Academy, and in particular Dr. Roux, were moved to learn of the possibility of such practices. The matter was referred to the alcoholism commission. »



It was not until 1956 that a circular prohibited the serving of all alcoholic beverages in public schools to children under 14 years of age.



Marina Bellot

 

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Mortalité due à l'alcool en France / Alcohol-related mortality in France

Mortalité due à l'alcool en France / Alcohol-related mortality in France

L'alcool est la 2ème cause de mortalité évitable en France. Alcohol is the second most common cause of preventable death in France.


Combien de morts dues à l'alcool en France ?

 

 

 

49 000    morts

 

L'alcool est la 2ème cause de mortalité évitable en France.

 

 

 

Selon les chiffres de l'Insee et de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, 49.051personnes sont mortes en France à cause de l'alcool en 2015. Le tabac et la consommation excessive d'alcool sont les deux premières causes de mortalité prématurée en France.

 

 

 

1.200.000

 

En 2015, le nombre de malades imputés à la consommation d'alcool est de 1,2 million.

 

 

 

Ainsi, en 2009, 49.000 décès étaient imputables à l’alcool en France, dont 22% chez les 15-34 ans, 18% chez les 35-64 ans et 7% après 65 ans. Il s’agissait surtout de cancers (15.000 décès), de maladies cardio-vasculaires (12.000 décès), de maladies digestives (8.000 morts dues à des cirrhoses) et d’accidents et suicides (8.000 morts). Les autres décès relevaient d'autres maladies dont des troubles mentaux liés à l'alcool.

 

 

 

En France, l'alcool cause la mort de 45 à 49 000 individus selon les années. Néanmoins, la tendance est à une légère baisse de la consommation d'alcool depuis 2005.

 

 

 

La consommation d'alcool en France était responsable de 49 000 décès en 2009, dont 40 % survenus avant 65 ans, soit 9% de l'ensemble des décès. Au début des années 2000, environ 37 000 décès étaient attribuables à l'alcool. 

 

 

 

L'alcool joue également un rôle causal dans de nombreux autres décès (accidents, suicides, cancers…) Près d'un tiers des décès liés à l'alcool ont été provoqués par des cancers (15.000 décès par cancer), contre 12.000 par maladies cardiovasculaires, 8.000 par maladies digestives, et 3.000 par maladies mentales et troubles du comportement.

 

 

 

13%

 

 

 

La France fait partie des pays où l'alcool est le plus meurtrier. Alors que la proportion des décès attribuables à l'alcool chez les hommes est de 13% en France, elle n'est que de 6,8% en Écosse, 5% en Suisse, 3% dans l'est de l'Allemagne et en Italie, et de 1% dans l'ouest de l'Allemagne et au Danemark.

 

 

 

Les morts dues aux drogues en France 

 

 

 

  • Tabac           78.966 (2015)
  •  
  • Alcool           49.051 (2015)
  •  
  • Héroïne              53
  •  
  • Opioïdes licites   43
  •  
  • Cocaïne              30
  •  
  • Cannabis             6

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Syndrome d’alcoolisation fœtale

 

 

 

10 %

 

 

 

Selon le Centre pour la santé mentale et les addictions de Toronto au Canada, 10 % des femmes consomment de l’alcool pendant leur grossesse. C’est le résultat de la plus vaste étude mondiale menée sur l’alcoolisme prénatal.

 

 

 

119 000

 

 

 

Selon cette étude, ce sont donc près de 15 nouveau-nés sur 10 000 qui souffrent d’un syndrome d’alcoolisation fœtale, soit 119 000 enfants par an dans le monde. (2017)






How many deaths due to alcohol in France?







49,000 deaths



Alcohol is the second most common cause of preventable death in France.







According to figures from INSEE and the Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, 49,051 people died in France from alcohol in 2015. Tobacco and excessive alcohol consumption are the two leading causes of premature death in France.







1.200.000



In 2015, the number of patients attributed to alcohol consumption is 1.2 million.







In 2009, 49,000 deaths were attributable to alcohol in France, including 22% among 15-34 year-olds, 18% among 35-64 year-olds and 7% after 65 years of age. These were mainly cancers (15,000 deaths), cardiovascular diseases (12,000 deaths), digestive diseases (8,000 deaths due to cirrhosis) and accidents and suicides (8,000 deaths). The other deaths were due to other diseases, including alcohol-related mental disorders.







In France, alcohol causes the death of 45 to 49,000 individuals depending on the year. Nevertheless, there has been a slight decrease in alcohol consumption since 2005.







Alcohol consumption in France was responsible for 49,000 deaths in 2009, 40% of which occurred before the age of 65, representing 9% of all deaths. In the early 2000s, approximately 37,000 deaths were attributable to alcohol.







Alcohol also plays a causal role in many other deaths (accidents, suicides, cancers...) Almost a third of alcohol-related deaths have been caused by cancers (15,000 deaths by cancer), compared to 12,000 by cardiovascular diseases, 8,000 by digestive diseases, and 3,000 by mental diseases and behavioural disorders.







13%







France is one of the countries where alcohol is the most deadly. While the proportion of deaths attributable to alcohol among men is 13% in France, it is only 6.8% in Scotland, 5% in Switzerland, 3% in eastern Germany and Italy, and 1% in western Germany and Denmark.







Drug-related deaths in France







Tobacco 78,966 (2015)

Alcohol 49,051 (2015)

Heroin 53

Legitimate opioids 43

Cocaine 30

Cannabis 6



















Fetal Alcohol Syndrome







10 %







According to the Centre for Mental Health and Addictions in Toronto, Canada, 10% of women consume alcohol during pregnancy. This is the result of the world's largest study on prenatal alcoholism.







119 000







According to this study, nearly 15 out of 10,000 newborns suffer from fetal alcohol syndrome, or 119,000 children per year worldwide. (2017)

 

 

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